4 nov. 2012

Maître



Une question parmi celles innombrables que pose le dilemme de l’œuf avant la poule ou de la poule avant l’œuf:  qui du maître ou de la soumise fait son pendant?
Pourquoi autrement suis-je soumise et vous appelé-je maître?
Je vous regarde dormir, aux heures du matin, quand votre regard est flou et votre bouche entrouverte. Les cheveux en bataille et la ride lasse. Je vous regarde dormir et je me demande: qui de nous deux fait l'autre?
Par ces temps érotiquement déserts, la ménagère de moins de cinquante ans se délecte d'un roman de pacotille qui, revêtu d'un costume de souffre, n'est autre qu'un Harlequin de bas étage.
Mais soudain, fleurissent sous la plume des journalistes suivie d'une cohorte de sociologues ou de psychologues, toutes les définitions de ce que nous sommes. Des professionnel(le)s du BDSM portent la voix pour propager les mêmes poncifs, et rassurer la ménagère soudainement en proie à ses fantasmes et à ses perversités de fin de frigo.
Que lit-on? Dans le couple D/s, le soumis est le véritable dominant. La douleur n'est pas importante, c'est le plaisir qui compte... Le sm soft est une acceptable perversité...

Je ne suis pas contre tout cela. Je me pose des questions. Je regarde ce que je vis, ce que je réclame de vous.

Et je m'adresse à mon maître. Je lui dis mon besoin de lui. De son pouvoir, de sa fermeté et de son autorité. Il dort encore, la ride reposée, l'esprit parfois tourmenté. Je lui dis de s'affermir, de s'assurer, de me contraindre... à plus. Suis-je de celles qui font les maîtres?

Je ne suis pourtant rien sans lui.

Et la douleur, cette douleur qui légère m'est insupportable. Qui titillante, me déclencherait des monstres de violence, cette douleur même que de tout homme (ou femme) maltraitant, je ne tolèrerais pas, qui me ferait souffrir à en mourir. Cette douleur, je vous la réclame au centuple, je vous encourage à me la donner et elle devient notre communion passionnelle. Est-elle tolérable? Est-elle seulement acceptable?

Seriez-vous le même sans ma douleur, seriez-vous mon maître? Serai-je votre soumise si je vous la refusais?

Je me fonds en vous, dans votre douceur qui m'enserre en poignes et en griffes. Je m'abandonne à votre amour au travers de mes larmes et de mes sourires... Suis-je soumise parce que vous êtes le maître?

Maître: un jouet n'est rien sans vos manipulations. Vous ne joueriez pas son votre objet. Nous sommes, seront, étions indissociables l'un de l'autre car nous ne sommes pas nés l'un de l'autre. Nous sommes les deux faces d'un même être. Nos besoins se répondent car ils s'emboîtent parfaitement. Nos désirs dialoguent dans le délicat concerto de notre amour. Et oui, notre SM sera toujours soft, puisqu'il n'est qu'une douce torture, qu'une humilité offerte, qu'une contrainte bienveillante.

Maître, je vous appelle maître, comment se pourrait-il autrement, puisque vous régnez sans conteste sur mon cœur. Maître, vous êtes maître, et je ne suis pas le dominant de notre couple, je ne vous délègue pas de pouvoir, je ne suis pas le fort de notre paire qui se fait tout petit pour son bien. Il m'est viscéralement nécessaire de vous savoir au-dessus de moi. Il m'est vital de vous sentir m'écraser de votre volonté. Comme il m'est indispensable que vous me frappiez sans haine, que vous me torturiez avec attention, que vous me soumettiez, en un mot. Je ne vous regarderais pas sinon, autrement qu'avec mon regard maternel et bienveillant... Je ne serais pas votre amante. Je ne vous aimerais pas autrement qu'en soumis.

Maître, je vous appelle maître. Comment pourrais-je faire autrement puisque je vous aime passionnément.

2 commentaires:

  1. Ce billet fait curieusement écho à une conversation que j'ai eue avec Monsieur aujourd'hui même...
    Je souscris totalement à cette vision, une fois de plus :-)

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  2. @Encore accord: il est vrai que je suis toujours très "à mon aise" quand je lis aussi ton blog. Un certain confort intellectuel à te lire. Sourire.

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